Étalement urbain et mobilités dans l’aire urbaine d’Avignon – Un État des lieux.

7 Février 2020

Table des matières

I) Panorama de l’aire urbaine d’Avignon 3

A) Pourquoi l’aire urbaine ? 3

B) Démographie, peuplement et densité 4

C) Logements, urbanisme et occupation des sols 5

D) Mobilités et dépenses énergétiques 7

II) L’action locale en matière d’étalement urbain 9

A) L’Agenda 21 du Vaucluse 9

B) Le Schéma de Cohérence Territoriale (ScoT) du bassin de vie d’Avignon (BVA) 10

1) Rappels sur le Syndicat Mixte et le SCoT 10

2) Le contenu du nouveau SCoT 11

C) Le Plan de déplacement urbain (PDU) du Grand Avignon 13

D) Le Plan local d’urbanisme (PLU) d’Avignon 14

ANNEXES 15 ( Les Annexes sont disponible sur demande à sylvain.iordanoff@vaucluse.fr )

Annexe 1: Évolution du continuum bâti 15

Annexe 2: Évolution du peuplement 16

Annexe 3: Constructions et types de logements 17

Annexe 4: nombre d’emplois et d’actifs 18

Annexe 5: Aire urbaine et réseau ferroviaire 19

Annexe 6: Vulnérabilité énergétique dans l’aire urbaine 20

Annexe 7: Coût des déplacements domicile-travail 21

Annexe 8 : périmètre du Bassin de Vie d’Avignon 22

Annexe 9 : Zone commerciale et densification 23

Annexe 10 : Transports en commun dans le PDU 24

Annexe 11 : PDU et vélo 25

Annexe 12 : PDU et voiture alternative 26

Annexe 13 : PLU et modes doux 27

I) Panorama de l’aire urbaine d’Avignon

A) Pourquoi l’aire urbaine ?

Une aire urbaine, au sens de l’INSEE, se compose de deux ensembles:

  • Au centre, un pôle urbain (ou unité urbaine). Le pôle urbain regroupe plusieurs caractéristiques: une continuité du bâti (pas plus de 200m de coupure entre deux constructions), une population d’au moins 2000 personnes, et un seuil d’activité d’au moins 10 000 emplois. 
  • Autour, une couronne. Celle-ci se caractérise par un critère de mobilité quotidienne: une commune appartient à une couronne lorsqu’au moins 40% des actifs de cette commune travaillent dans le pôle urbain ou dans les communes attirées par celui-ci.

Par conséquent, une commune de petite taille peut faire partie d’un pôle urbain, pour peu qu’elle soit en proche périphérie d’une grande ville. C’est par exemple le cas de Jonquerettes (1500 hab.) par sa proximité avec Avignon. Par ailleurs, une commune peut à la fois faire partie d’un pôle urbain, et d’une couronne. Il suffit pour cela qu’elle soit suffisamment intégrée au pôle urbain sur le plan du bâti, tout en ayant un grand nombre d’actifs employés dans une autre commune.

Enfin, et par-dessus tout, une aire urbaine englobe des communes de divers départements et EPCI. L’aire urbaine est donc un échelon d’analyse fondé sur une réalité quotidienne, économique et sociale, qui s’affranchit des découpages administratifs. Le zonage en aire urbaine (ZAU) se calque sur l’attractivité réelle des territoires et les déplacements des habitants dans leur bassin de vie. En cela, cet échelon est pertinent pour appréhender les questions d’étalement urbain, de mobilités et d’aménagement du territoire.

B) Démographie, peuplement et densité1

En 2010, l’aire urbaine d’Avignon (AUA) regroupe 97 communes, près de 500 000 habitants2. Elle s’étale sur près de 2000km² et contient 11 communes de plus de 10 000 habitants.  L’AUA a connu la plus forte extension à l’échelle nationale sur une période récente: entre 1999 et 2010, sa population a augmenté de 76% et sa surface de 136%. Cette extension est surtout liée à celle de son pôle urbain, dont la surface a été multipliée par 2,7, suite à la jonction de 4 pôles urbains déjà existants mais séparés en 1999.

Sur ce point, l’extension de l’AUA diffère donc de celle des autres aires urbaines de France, qui ont plutôt vu leur couronne s’élargir. Alors que les autres aires urbaines ont connu un étalement vers l’extérieur par la périurbanisation de leurs espaces limitrophes, l’AUA s’est en quelque sorte “étalée vers l’intérieur”. De nouvelles constructions se sont insérées entre les espaces déjà urbanisés, produisant une vaste conurbation entre entre les pôles urbains d’Avignon, Orange, Cavaillon et l’Isle-sur-la-Sorgues. (voir Annexe 1)

Il en résulte une faible différence de densité entre le pôle urbain de l’AUA, et sa couronne. Le rapport est de 1 pour 3,5: la densité du pôle urbain est en moyenne 3,5 supérieure à la densité dans la couronne. Ce rapport est, à titre comparatif, de 1 pour 6,5 à l’aire urbaine de Toulon (env. 600 000 hab.), et de 1 pour 11 à l’aire urbaine de Montpellier (env. 530 000 hab.). Si bien qu’en 2010, l’AUA est l’aire urbaine la moins dense de France, parmi celles qui comptent au moins 200 000 habitants. Son pôle urbain présente une densité moyenne de 323 hab/km², contre 820 hab/km² en moyenne pour les autres pôles urbains de France. Et pour cause, ce pôle urbain s’est étendu de +168% entre 1999 et 2008, bien plus que dans la plupart des aires urbaines voisines: +3% à Nice, +34% à Marseille-Aix en Provence, +111% à Montpellier. 

Le dynamisme démographique de l’AUA a principalement été porté par un fort accroissement naturel (natalité élevée), ainsi que par d’importants flux migratoires des villes principales vers les communes périphériques. Entre 1968 et 2008, les villes principales (Avignon, Orange, Carpentras, Cavaillon)  ont même en moyenne perdu des habitants, tandis que les communes périphériques ont en moyenne augmenté leur population de 2,1%. Cet accroissement a été particulièrement fort dans quelques communes du Ventoux-Comtat Venaissin, ainsi que du côté du Pont du Gard, de la périphérie de Carpentras, ou encore du Coustellet-Luberon. (Voir Annexe 2)

On verra plus loin que ces territoires de couronne, qui ont capté l’essentiel de la croissance démographique sur période récente, se caractérisent également par une faible densité, une forte tendance à la construction de logements individuels, ainsi qu’un déficit en emplois.

La forte croissance démographique des communes de périphérie s’explique par plusieurs facteurs. D’une part, des migrations résidentielles en provenance des quatre villes principales, avec un flux positif d’environ 1000 personnes par an. D’autre part, l’arrivée, depuis 2003, de résidents en provenance du reste de la France, et particulièrement de région PACA et de Paris. Il s’agit souvent de jeunes actifs travaillant dans l’aire urbaine de Marseille-Aix en Provence, qui viennent résider dans l’AUA. Ce flux de nouveaux résidents représente environ 1600 personnes par an. Cela dit, l’AUA perd de nombreux étudiants, notamment au profit des aires urbaines de Montpellier et de Lyon. 

D’ici 2040, selon les projections de l’INSEE, la population de l’AUA pourrait avoir augmenté, au maximum, de 140 000 habitants supplémentaires, soit une hausse de 28%. L’évolution projetée du nombre de ménages sera même supérieure. De plus, 32% de la population de l’AUA aura plus de 60 ans (contre 22% aujourd’hui). Ces tendances démographiques se traduiront automatiquement par un besoin en logements plus important. 

C) Logements, urbanisme et occupation des sols

Depuis les années 1970, la combinaison d’un fort accroissement démographique, d’un réseau routier très développé et d’un relief de plaine, a entraîné une dynamique de périurbanisation dans l’AUA. Ce mode de développement a produit un tissu urbain très peu dense fortement consommateur d’espace. Ainsi, en 2006, 72,5% des espaces urbanisés sont constitués par du tissu urbain peu dense.

Et pour cause, 83% des espaces consommés par l’urbanisation entre 2000 et 2006 étaient des espaces agricoles. Il en résulte qu’entre les espaces bâtis, on trouve de nombreux espaces agricoles encore largement cultivés.

Sur le plan du logement, une analyse des permis de construire déposés entre 2002 et 2011 montre une forte propension à la construction de logements individuels: ceux-ci représentent 65% du parc de résidences principales, contre 51% en moyenne dans les aires urbaines de taille équivalente. Ceci dit, la construction de logements individuels n’a que très peu concerné les villes principales: Avignon, Cavaillon et Carpentras ont davantage construit de logements collectifs sur la période. C’est également le cas dans les communes moyennes de la périphérie avignonnaise: Caumont sur Durance, Le Pontet, ou Morières-lès-Avignon. 

La construction de logements individuels a principalement affecté un ensemble de petites communes de couronne périurbaine, à l’Ouest de Carpentras: Bédoin, Flassan, Villes-sur-Auzon… et à l’Ouest de Cavaillon: Cheval-Blanc, Taillades, Lagnes, etc. Même tendance au Nord et à l’Est d’Orange: Uchaux, Travaillan, Caderousse, ainsi qu’à l’Ouest d’Avignon, donc côté Gard: Pujaut, Sauveterre, Saze. C’est aussi le cas, dans une moindre mesure, dans quelques communes de l’AUA côté Bouches-du-Rhône: Noves, Eygalières. (voir Annexe 3)

Sur ces cinq territoires de couronne, ce n’est pas tellement le nombre de logements individuels construits qui est impressionnant. Vu le faible nombre d’habitants dans la plupart de ces communes, il n’est pas étonnant que le volume de permis de construire délivrés sur la période 2002-2011 ne dépasse pas les 200. Ce qui est significatif, c’est la part de logements individuels dans la construction neuve. Dans les communes évoquées précédemment, elle peut avoisiner les 100%.

Cette omniprésence de la maison individuelle ne se limite pas à la couronne de l’AUA. Elle concerne aussi l’agglomération avignonnaise (60% de maisons individuelles selon l’enquête INSEE Logement de 20063), ainsi que le Vaucluse en général (65% de maisons individuelles selon le recensement de 2015). Cette prépondérance est portée par des représentations sociales qui associent l’accession à la propriété au pavillon individuel. 83% des locataires qui souhaitent devenir propriétaires opteraient pour l’habitat individuel. Dans un sondage de 2013, Orpi notait que la maison individuelle “est considérée comme un idéal de vie à acquérir pour 83% des français“, alors même qu’une crise financière d’origine immobilière venait de se produire quelques années auparavant. 

En bref, appartements et maisons ne sont pas substituables. Cela signifie qu’une politique de densification urbaine par l’incitation à habiter dans des appartements en ville n’aurait que peu d’effets sur les comportements individuels. L’habitat individuel et pavillonnaire semble davantage motivé par des aspirations sur le cadre de vie, que par des considérations liées aux prix de l’immobilier, ou à une volonté d’isolement. Les néo-ruraux ne cherchent pas tant à s’isoler de la densité urbaine et de ses prix inaccessibles, ils souhaitent avant tout disposer d’un confort lié au jardin, aux paysages, plus propices à la vie familiale. Certains s’attendent même à retrouver, en périphérie, une forme de solidarité de quartier semblable à celle qui caractérise le milieu rural. (par opposition à un centre-ville qui peut produire de l’individualisme par la massification)

Ainsi, les personnes qui s’installent en périphérie ne reviendront pas en ville sous prétexte que les bâtiments y sont désormais plus hauts, au contraire. Ils ne le feront pas non plus quand bien même les appartements seraient plus accessibles financièrement. En effet, malgré ce que l’on pourrait croire, les ouvriers et les employés sont largement majoritaires dans le total des acquéreurs de maisons individuelles en Vaucluse (entre 2011 et 2013). Leur capacité d’achat étant limitée, il en résulte que ces ménages modestes ont de toute façon tendance à considérablement s’endetter pour acquérir leur terrain en périphérie. C’est a fortiori le cas dans un contexte de hausse des prix du foncier depuis 2009. 

De plus, en 2016, malgré que les actifs de l’AUA aient des revenus relativement faibles, 55% des résidences y sont occupées par des propriétaires. C’est plus que dans toute autre grande aire urbaine environnante. Ceci nous incite à croire que les prix du logement ne sont pas la principale variable explicative des comportements individuels, en tout cas pour ce qui concerne l’acquisition.

Pour toutes ces raisons, il est probablement plus pertinent de penser une densification des périphéries (avec ce que cela suppose sur le plan des mobilités et des services), plutôt qu’une densification des villes. 

D) Mobilités et dépenses énergétiques

A l’échelle de l’AUA, la différence entre le nombre d’emplois et le nombre d’actifs occupés par commune met en évidence des communes excédentaires en emploi: Avignon, Cavaillon, Orange, Carpentras, Le Pontet et Sorgues. Elles constituent des destinations privilégiées en termes de déplacement domicile-travail. Les communes connaissant les plus forts déficits en emplois sont situées à proximité des principales communes excédentaires et le long des grands axes de communication. (voir Annexe 4)

Sans surprise, parmi les communes les plus déficitaires en emplois, on retrouve les territoires à forte démographie et à forte part de logements individuels précédemment évoqués:

  • pourtour de Carpentras: Comtat Venaissin et CC Terrasses du Ventoux 
  • proche périphérie de Cavaillon: partie Sud de la CC Provence Lubéron Durance, et CC du Coustellet
  • périphérie Nord et Est d’Orange: CC Aygues Ouvèze en Provence, et Côte du Rhône Gardoise
  • périphérie d’Avignon côté Gard (CC Pont du Gard) et Bouches du Rhône (CC Rhône Alpes Durance)

Sur ces territoires, le ratio actifs résidents / emplois peut être inférieur à 0,5: pour 10 actifs résidents, la commune offre moins de 5 emplois. La part des actifs sortant de leur commune de résidence pour travailler y est donc logiquement plus importante. En 2008, l’AUA comptait 78 communes (sur un total de 97) avec 60% des actifs travaillant dans une autre commune. (contre moins de 35% dans les villes principales)

Parmi ces navettes domicile-travail, 93% des actifs travaillant hors de leur commune de résidence utilisaient la voiture. La voiture est également prépondérante chez ceux qui travaillent pourtant dans leur commune de résidence: 65% des déplacements. Ajoutons que globalement, la part des trajets domicile-travail réalisés en voiture est en moyenne supérieure dans l’AUA (83%) relativement aux aires urbaines environnantes (69% à Marseille-Aix en Provence, 71% à Montpellier), et à la moyenne nationale (70%).4

En 2008, l’utilisation des transports en commun restait très minoritaire, même dans les villes principales. Seuls 3% des actifs les utilisent comme premier mode de déplacement. Même ceux qui travaillent là où ils habitent ont tendance à préférer la marche à pied (15%) ou les deux-roues (6%) aux transports en commun. En 2016, la part des déplacements domicile-travail en transports en commun dans l’AUA (3,6%) était très inférieure aux cas d’Aix-Marseille (16%) et Montpellier (12%).

Il y a donc fort à faire du côté de l’offre de transports en commun par la collectivité. Surtout, l’AUA dispose d’un important potentiel ferré: environ 92% de sa population habitent à moins de 10min de voiture d’une gare existante, en projet de réouverture ou potentiellement réutilisable. Malgré cela, la ligne de TER Rive droite du Rhône, qui relie Pont-Saint-Esprit à Nîmes en passant par Avignon et Bagnols-sur-Cèze, est réservée au fret depuis les années 1970. Sa réouverture aux usagers SNCF, qui semble constamment repoussée pour des questions de coûts et de délais, devrait débuter à partir de 2025.5 

Plus généralement, il est nécessaire de penser une offre de transports collectifs à l’échelle de l’aire urbaine, puisque les déplacements domicile-travail sont structurés autour d’une étoile ferroviaire. (voir Annexe 5) Or, le réseau TER PACA est actuellement calqué sur la carte de la région administrative Sud PACA. Et la plupart des aires urbaines s’étalent sur plusieurs départements et régions, en particulier l’AUA qui s’étale sur trois départements, deux régions et 16 EPCI. Il paraît donc crucial de découpler l’offre de transports des découpages administratifs, de sorte que les collectivités puissent s’entendre pour proposer un réseau de transports collectifs adaptés au quotidien des habitants.

Surtout, les dépenses liées aux transports individuels ont un poids prépondérant dans les budgets des ménages, et peuvent être la cause de précarité énergétique. Si la performance énergétique des logements et des véhicules s’est améliorée depuis 20 ans, cela n’a pas empêché la part de l’énergie dans le budget des ménages de rester stable. En cause, la hausse de consommation résidentielle liée à l’individualisation et à l’agrandissement des logements (chauffage, appareils électriques…), ainsi que l’augmentation du nombre de véhicules dûe à la déconnexion entre lieu de travail et d’habitat. Ainsi, l’INSEE estimait en 2010 que “la facture énergétique des ménages serait 10% plus faible sans l’étalement urbain des 20 dernières années“.6 En France, en 2006, les dépenses d’énergie représentaient 8,4% du budget des ménages. (4,8% pour le logement et 3,6% pour le carburant) Selon la même enquête, “un ménage équipé d’une voiture dépense 440€ de carburant de plus par an s’il est installé en zone périurbaine plutôt qu’en ville-centre de province“.

On parle de précarité énergétique lorsque la part de l’énergie dans les dépenses est supérieure ou égale à 10%7 du budget. Cette situation concerne près de 20% des ménages vauclusiens8, contre 14,6% à l’échelle nationale et 7,4% en région PACA.9 En moyenne, 9% du revenu disponible des ménages vauclusiens est destiné aux dépenses énergétiques, contre 7% pour la région PACA. Le Vaucluse est donc un territoire particulièrement vulnérable aux dépenses énergétiques. Ces difficultés sont dues à la faiblesse des revenus, aux longues distances domicile-travail, ainsi qu’à l’absence d’alternative crédible en transport en commun. Plus précisément, la vulnérabilité énergétique affecte surtout les cinq territoires de couronne évoqués précédemment. (voir Annexes 6 et 7) L’intra-muros avignonnais concentre 22% de la précarité énergétique avignonnaise. Le quartier Magnanen-Teinturiers est le plus affecté.

La réduction des dépenses énergétiques individuelles, qu’elles soient liées au logement ou aux déplacements, est donc un enjeu majeur de réduction de la pauvreté. C’est aussi évidemment un enjeu pour la climat. En 2015, les transports constituent la principale source de gaz à effet de serre (GES) et sont à l’origine de près de 39% des émissions de CO2.10 Il s’agit du seul secteur d’activité pour lequel les émissions de GES ont augmenté sur la période 1990-2015: +11,9%, alors que les émissions globales sur le territoire national ont baissé de 16,4%. La part des émissions incombant au résidentiel-tertiaire est de près de 19%

En terme de consommation d’énergie, le résidentiel-tertiaire demeure le principal consommateur final (45%), suivi par les transports (33%). Le secteur routier représente près de 83% des consommations énergétiques des transports, une part stable depuis 10 ans.

II) L’action locale en matière d’étalement urbain

Intéressons-nous à présent à la façon dont les documents locaux d’urbanisme prennent en compte la question de l’étalement urbain et de la vulnérabilité énergétique qui en découle. On examinera l’action locale dans l’ordre décroissant de l’échelle de grandeur des périmètres d’action: de l’échelon départemental (Vaucluse) à l’échelon municipal (Avignon), en passant par l’échelon du bassin de vie (Syndicat mixte du Bassin de vie d’Avignon, SMBVA) et par l’échelon communautaire (Grand Avignon).

A) L’Agenda 21 du Vaucluse

Les Agendas 21 départementaux ont la vocation de réaliser les 17 objectifs de développement durable (ODD) prescrit par les Nations Unies. Après une première mouture sur la période 2011-18, l’Agenda 21 du Vaucluse a été révisé pour développer des actions sur la période 2020-25. 

Ainsi, le Département souhaite développer les pratiques de mobilité durable (axe n°15)11. Ceci passe par quatre ensemble d’actions.

  • tout d’abord, la mise en œuvre d’un plan de déplacement des agents axé sur les véhicules électriques et le vélo. A l’heure actuelle, ces moyens de locomotions sont volontiers mis en avant. Mais leur utilisation se limite à des déplacements internes (entre sites du Département), excluant tout usage domicile-travail, qui serait de toute façon impossible par la très petite quantité de ces véhicules. Pour réduire les déplacements quotidiens, le télétravail est également à l’étude, bien qu’il ne saurait être une solution à lui seul.
  • Ensuite, le développement du covoiturage. Il s’agit d’aménager des aires et de mettre en place un réseau de partenariat animé et fonctionnel. Cette action doit particulièrement être menée, vu le très faible nombre d’aires de covoiturages sur le territoire du Vaucluse.12 Elle sera d’autant plus réussie que la fréquentation de ces aires ainsi que des applications de covoiturage, augmentera. Ceci passe par des conventions avec les EPCI et communes.
  • La mise en œuvre d’actions spécifiques pour la mobilité des publics cibles, pour lesquels le Département propose surtout de soutenir les initiatives locales.
  • Enfin, la communication et l’information des usagers de routes départementales sur le trafic, la prévention, et les risques. En dehors du fonctionnement habituel des médias d’information sur le trafic routier, on voit mal en quoi cela constitue une avancée majeure en terme de mobilité durable.

L’axe n°17 vise à développer l’usage du vélo, à travers trois ensemble d’actions :

  • l’accompagnement des territoires pour la mise en œuvre du schéma vélo. Il s’agit essentiellement de développer des itinéraires reliant les principaux pôles d’attractivité. L’ampleur de cette action pourra être mesurée par longueur et le nombre des itinéraires balisés, ainsi que le nombre et le montant des aides aux collectivités pour leurs projets. 
  • Le développement des axes de véloroutes, dont la fréquentation doit être augmentée dans la mesure du possible. Il est par ailleurs nécessaire d’adapter les routes départementales existantes.
  • Enfin, une série d’actions en direction des collèges dont l’impact sera vraisemblablement moindre.

Ces deux axes constituent l’essentiel de l’action départementale en faveur des mobilités durables, en tout cas pour ce qui concerne l’Agenda 21. Il n’est nullement fait mention de dispositifs incitatifs à destination des entreprises et des collectivités pour encourager les agents et employés à privilégier des modes de déplacements collectifs (transports, covoiturage) ou actifs (vélo). L’action départementale semble donc assez limitée.

B) Le Schéma de Cohérence Territoriale (ScoT) du bassin de vie d’Avignon (BVA)

1) Rappels sur le Syndicat Mixte et le SCoT

Le Syndicat Mixte pour le SCoT du BVA a été créé en 2003. Le périmètre du SCoT du BVA est à cheval sur deux régions (PACA / Occitanie) et deux départements (Vaucluse / Gard). (voir Annexe 8) Il couvre 4 intercommunalités : le Grand Avignon, la Communauté de Communes du Pays Réuni d’Orange, la Communauté de Communes des Sorgues du Comtat, et la Communauté de Communes Aygues Ouvèze en Provence. Il s’étend sur 770,79 km², représente 34 communes (7 dans le Gard et 27 dans le Vaucluse) et 304 224 habitants.

Son Bureau est constitué d’un Président et de 11 Vice-Présidents, qui cumulent des fonctions communales et intercommunales. Le Comité Syndical composé de 48 membres titulaires vote les délibérations. La répartition des sièges par EPCI est définie dans les statuts du Syndicat mixte. Les compétences du Syndicat Mixte sont :

  • L’élaboration du SCoT du BVA
  • Le suivi de la réalisation des objectifs préconisés par le ScoT
  • La gestion dans le temps du document et des modifications /révisions éventuelles

Les Schémas de Cohérence Territoriale (SCoT) permettent aux communes appartenant à un même bassin de vie de mettre en cohérence, leurs politiques dans les domaines de l’urbanisme, de l’habitat, des implantations commerciales, des déplacements et de l’environnement. Ce document d’urbanisme de planification urbaine découle de la mise en application des lois Solidarité et Renouvellement Urbain de décembre 2000 et Urbanisme et Habitat de juillet 2003 qui incitent les territoires à se fédérer autour d’un projet de territoire commun. Le SCoT du BVA a été approuvé le 16 décembre 2011. Il est mis en œuvre pour une durée de 10 ans, période au bout de laquelle le syndicat mixte doit effectuer un bilan et décider soit de reconduire le document existant, soit de le mettre en révision.

Deux ans après son approbation, les élus ont décidé, le 1er Juillet 2013, d’engager la révision du SCoT. L’objectif est d’adapter le projet aux nouveaux enjeux, à l’élargissement du périmètre (intégration en 2014 des communes d’Orange, Pujaut et Sauveterre) et aux évolutions législatives et réglementaires (lois Grenelle de 2010, confirmée par la loi ALUR de 2014). Ainsi, un nouveau projet de ScoT a été arrêté le 9 décembre 2019 en Comité Syndical.

2) Le contenu du nouveau SCoT

Dans son Document d’Orientation et d’Objectifs (DOO), le nouveau ScoT porte une ambition renouvelée pour répondre aux besoins d’un territoire dynamique (Partie 3 du DOO). Ceci passe notamment par l’affirmation d’un « nouveau cap en matière d’aménagement commercial et d’artisanat » (sous-partie 2)13. Le devenir des zones commerciales sera encadré. Une localisation préférentielle pour les équipements commerciaux sera définie, en cohérence avec l’armature urbaine et en faveur des centralités urbaines. Ce point ne doit pas être négligé, puisque les zones commerciales participent de l’étalement urbain, de la dévitalisation des centre-villes par la disparition des commerces de proximité, et de l’allongement des déplacements, y compris pour ceux qui y travaillent.

Le ScoT propose ainsi de localiser les commerces en fonction de leur catégorie (taille, type de produits, zone d’influence, fréquentation…) :

  • les commerces de proximité (haute fréquence d’achats, produits alimentaires) sont réservés aux centralités urbaines. 
  • La localisation des commerces occasionnels (besoins ponctuels, produits culturels et d’équipement de la personne) est ordonnée par priorité. 
    • Quand la surface du commerce est inférieure à 1000m², la priorité est aux centralités urbaines, puis aux zones commerciales locales dans un deuxième temps. 
    • Pour les surfaces de plus grande taille, la priorité est  aux centre-villes d’Avignon et d’Orange, puis aux zones commerciales majeures dans un deuxième temps.
  • Même chose pour les zones commerciales exceptionnelles (magasins très spécialisés à fréquentation trimestrielle voire annuelle)

Enfin, le ScoT insiste sur la nécessité de ne plus autoriser la création de nouvelle zone commerciale.  L’équipement commercial du ScoT répond largement aux besoins de la population, et les zones commerciales existantes ont un fort potentiel de densification (voir Annexe 9). Celles-ci ne doivent pas non plus étendre leur emprise foncière. L’implantation des « drive » (générateurs de trafic automobile et de surface de stockage) doit être organisée de manière optimale. (voir également les autres schémas illustratifs)

Ensuite, le ScoT met la priorité sur la « mobilité douce et l’articulation entre urbanisme et transports collectifs » (sous-partie 4). Ceci passe par le développement et l’articulation des transports collectifs:

  • l’étoile ferroviaire avignonnaise doit être complétée, par la réouverture aux voyageurs des lignes (Rive droite du Rhône) et des gares (Villeneuve, Roquemaure), ainsi que par l’amélioration du cadencement des lignes existantes.
  • Le réseau de cars régionaux doit être articulé avec les autres modes de transports, par le cadencement des lignes (faciliter les correspondances), la desserte des secteurs non desservis par le ferroviaire, et la mise en place d’aménagements pour séparer les flux de cars du trafic automobile.

Il est également proposé de bâtir un territoire des modes actifs. Pour cela, il faut :

  • assurer la qualité, la sécurité, la complémentarité et la continuité des itinéraires cyclables,
  • relier ces itinéraires aux sites stratégiques et aux stations de transports en commun,

En outre, le stationnement est considéré comme un levier pour développer les transports en commun. Il s’agit d’augmenter les taux de rotation, désinciter le stationnement dans les zones bien desservies par les transports, favoriser le covoiturage et le transfert modal. Par-dessus tout, l’objctif est de limiter la présence de la voiture dans l’espace public.

Une intermodalité efficace doit être garantie:

  • Les pôles d’échange multimodaux (PEM) seront hiérarchisés en fonction de leur rôle systémique et de leur potentiel d’intensification urbaine.
    • Les PEM de grande accessibilité sont des portes d’entrée du bassin de vie.
    • Les PEM stratégiques sont les interfaces entre le cœur urbain et le reste du territoire. Ils doivent permettre d’organiser le report modal (accessibilité aux lignes de transports) et l’implantation de parc relais.
    • Les PEM de proximité assurent la connexion des espaces ruraux et périurbains aux cœurs urbains.
  • Création d’un maillage de parc relais et de covoiturage. L’ensemble du territoire couvert par la ScoT doit avoir accès à un parc relai dans un temps de parcours de moins de 20min en voiture. Il s’agit de sites privilégiés pour les bornes de recharge électrique, et l’auto-partage.

En définitive, le DOO du nouveau ScoT est un document d’urbanisme très complet, dont la lecture propose un aperçu de toutes les actions proposées par le Syndicat Mixte. Il s’articule avec un Projet d’Aménagement et de Développement durable (PADD), et il est décliné dans le Plan local d’urbanisme (PLU) sur lequel nous reviendrons un peu plus tard.

C) Le Plan de déplacement urbain (PDU) du Grand Avignon

Obligatoire pour les agglomérations de plus de 100 000 habitants, le PDU est une démarche de planification sur 10 ans pour élaborer un projet global en matière d’aménagement du territoire et des déplacements. Celui de la communauté d’Agglomération du Grand Avignon a été approuvé le 12 décembre 2016. Son élaboration a débuté en 2013.

L’axe 1 du PDU vise à développer une offre alternative à la voiture.14 

  • Ceci passe par le tramway et les lignes de bus à haute fréquence. A l’horizon 2025, la ligne de tramway initiale sera prolongée vers l’île Piot d’une part et vers St-Lazare d’autre part. (voir Annexe 10) La fréquence des lignes de bus gardoises sera augmentée.
  • Les partenaires seront mobilisés autour de l’enjeu ferroviaire. La réouverture des gares du Pontet et de Villeneuve est planifiée.
  • Les entrées de ville seront aménagées pour assurer les vitesses réglementaires tandis que les zones 30 seront prévues sur les voiries de desserte. Les cœurs médiévaux, aux ruelles inadaptées à l’automobile, basculeront en zones de rencontre.
  • Une série de mesures est programmée afin de développer et sécuriser la pratique du vélo : aménagements aux carrefours existants (Annexe 11), amélioration des conditions de stationnement privé et public des deux-roues (consignes à vélos), développement du service Vélopop, aides à l’achat de vélos à assistance électrique, développement du vélo dans le cadre des Plans de Déplacements Entreprises.
  • Il est aussi prévu de développer les usagers alternatifs de la voiture : autopartage, covoiturage, voiture électrique. (Annexe 12)

L’axe 2 du PDU vise à maîtriser les flux. Sans rentrer dans les détails, il s’agit de hiérarchiser et d’optimiser le réseau routier ; de réguler les flux par le stationnement ; d’encourager le transport multi-modal de marchandises. (voir document complet à part pour plus de précisions)

L’axe 3 du PDU vise à accompagner le changement dans la durée :

  • accompagner les communes vers un urbanisme durable. Une réglementation commune des normes de stationnement sera initiée pour réduire le stationnement public sur voirie au bénéfice du stationnement privé mutualisé. Les obligations en matière de réalisation de places de stationnement seront plafonnées. La continuité des cheminements piétons sera exigée.
  • La sensibilisation et l’information de la population sont impératives pour initier un changement de comportement. Cette démarche d’information passe par le recrutement d’un Conseiller Mobilité, la mise en place d’une Maison des Transports, ainsi que le recueil de connaissances via l’Enquête Déplacement Grand Territoire.

En définitive, l’échelon intercommunal semble particulièrement adapté pour mener une politique de transition dans les transports. C’est a fortiori le cas pour le Grand Avignon, qui rassemble des communes de taille intermédiaires autour d’une ville très peu dense de moins de 100 000 habitants. Il faut noter que si les ambitions du PDU en terme d’évolution des parts modales sont modestes (baisse de 9,3% du trafic routier d’ici 2025), elle s’inscrivent tout de même sur une échéance proche et dans un cadre d’actions précis et incitatif.

D) Le Plan local d’urbanisme (PLU) d’Avignon

Le PLU d’Avignon a été approuvé en 2011. Sa révision a été engagée par le Conseil municipal en juin 2015. Une phase de concertation a été menée jusque fin 2017 pour impliquer les habitants. Le nouveau PLU semble être en vigueur depuis 2018, mais faute de documentation, il n’est possible que de commenter les compte-rendus de réunions publiques. Une réunion s’est notamment tenue le 19 octobre 2016 à la salle Cabrières sur le thème “Avignon, vivre ma ville en 2030”. La présentation projetée lors de cette réunion constitue l’aperçu le plus rapproché des orientations du nouveau PLU.

Il y est fait mention de définir la place de la voiture dans l’espace public. Le stationnement doit être adapté aux objectifs de diminution de la voiture et de pacification de l’espace urbain, en lien avec l’amélioration de l’offre en transports collectifs et les modes doux. Sur ce point, on trouve un schéma d’intentions pour la mise en œuvre d’un réseau de modes doux. (Annexe 13) De manière générale, le PLU est surtout une déclinaison à l’échelle municipale des objectifs fixés par le ScoT.

Article rédigé par Lucas NOWICKI sous la direction de Sylvain IORDANOFF

ANNEXES ( Les annexes sont disponible sur demande )

Annexe 1: Évolution du continuum bâti

Annexe 2: Évolution du peuplement

Annexe 3: Constructions et types de logements

Annexe 4: nombre d’emplois et d’actifs 

Annexe 5: Aire urbaine et réseau ferroviaire

Annexe 6: Vulnérabilité énergétique dans l’aire urbaine

Annexe 7: Coût des déplacements domicile-travail

Annexe 8 : périmètre du Bassin de Vie d’Avignon

Annexe 9 : Zone commerciale et densification

Annexe 10 : Transports en commun dans le PDU

Annexe 11 : PDU et vélo

Annexe 12 : PDU et voiture alternative

Annexe 13 : PLU et modes doux